Il semblerait que les femmes aient le droit d’écrire des livres en 2020, mais seulement s’ils sont consensuels, seulement s’ils ne bousculent pas trop l’ordre patriarcal établi. Ainsi, depuis la publication de son ouvrage Le Génie Lesbien, Alice Coffin subi une nouvelle vague de cyber-harcèlement. Suite à ses positions estivales dénonciatrices des liens entre Gabriel Matzneff et Christophe Girard, ex-adjoint au maire chargé de la culture, Alice Coffin avait déjà été mise sous protection policière une première fois.
Aujourd’hui, ce qui déchaîne les fureurs par rapport à son nouvel ouvrage, ce sont quelques petites phrases écrites par la journaliste :
« Il ne suffit pas de nous entraider [les femmes, NDLR], il faut, à notre tour, les éliminer [les hommes, NDLR]. Les éliminer de nos esprits, de nos images, de nos représentations. Je ne lis plus les livres des hommes, je ne regarde plus leurs films, je n’écoute plus leurs musiques. »
Affirmer, publiquement ne plus s’imprégner d’une culture façonnée par les hommes, lui vaut d’être insultée, harcelée à coup de remarques sectaires et lesbophobes. Pourtant, personne ne bronche lorsqu’en 2016 on remarque qu’aucune femme n’a été au programme de l’épreuve de littérature de terminale du Bac Littéraire depuis sa création, en 1995. Et comment peut-on oser sortir le mot de « séparatisme » pour évoquer Alice Coffin, lorsque l’on sait que seules 12 femmes ont reçu un Goncourt, depuis 1904 ? Ainsi, les paroles de la militante féministe ne sont pas radicales mais nécessaires dans un monde où l’invisibilisation des femmes, et surtout des lesbiennes, est quotidienne. Il est peut-être temps de lire les ouvrages au lieu d’en extraire seulement des citations.
Ce sont ces valeurs qui dérangent l’université Catholique de Paris, qui lui causent la perte de son emploi, après 8 ans d’enseignement là-bas. Preuve que l’on peut être accusé de viol sans voir sa carrière brisée, mais qu’écrire des livres féministes peut-être bien plus préjudiciable.