©Simon Guillemin / le journaliste Michel Soudais qui couvre une manifestation du 26 mai 2019

Darmanin et les journalistes en manifestation : offense contre la liberté d’informer

Jeudi dernier, le 17 septembre, le Ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin signe un texte de 29 pages. C’est le nouveau schéma national du maintien de l’ordre (SNMO) et cela faisait plus d’un an qu’il était attendu. Sans parler des nouvelles directives quant à l’armement, aux ordres donnés, et la direction qui va à l’encontre d’un vœu d’apaisement,  c’est la place « particulière » donnée aux journalistes en manifestations qui choque. 

« Eu égard à l’environnement dans lequel ils évoluent, les journalistes peuvent porter des équipements de protection, dès lors que leur identification est confirmée et leur comportement exempte de toute infraction ou provocation. […] 

Il importe à cet égard de rappeler que le délit constitué par le fait de se maintenir dans un attroupement après sommation ne comporte aucun exception, y compris au profit des journalistes ou de membres d’associations. »

Rappelons tout d’abord que le métier de journaliste, défini par le code du travail, ne nécessite pas la possession d’une carte de presse. Demander une telle identification revient à  occulter presque totalement les journalistes indépendants, souvent sans carte de presse, qui sont ceux, et celles, qui sont en général au plus près des manifestants et des actes des forces de l’ordre.  Sans carte de presse, quid de la liberté de documenter et de prendre des photos ? De plus, leur demander d’obtempérer aux sommations, qui seront apparement énoncées de manière plus claire, revient à leur refuser la documentation des manifestations. Comment observer et rendre compte de la manière dont les forces de l’ordre dispersent la foule si les journalistes ne peuvent rester sur place ?  Comme le souligne Libé dans un article signé par une quarantaine de sociétés de journalistes, c’est : 

« […] un feu vert accordé par le ministre de l’Intérieur aux forces de l’ordre pour empêcher les journalistes de rendre compte pleinement des manifestations, y compris de leurs dispersions et de leurs dérapages. »

Quand on sait que G. Darmanin souhaite interdire la diffusion d’images où le visage des forces de l’ordre n’est pas flouté, dans un contexte où la répression policière est de plus en plus forte, on se doute que les journalistes dérangent. Pourtant, un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme, en 2015, soulignait déjà que : 

« Les médias jouent un rôles crucial en matière d’information du public sur la manière dont les autorités gèrent les manifestations publiques et maintiennent l’ordre […] toute tentative d’éloigner des journalistes des lieux d’informations doit être soumis à un contrôle strict. »