Il semblerait que la parole des femmes dans le milieu du rap commence à se libérer avec #balancetonrappeur. Après l’affaire de Moha la Squale où plusieurs femmes ont porté plainte, et l’affaire de Roméo Elvis, on se dit que la donne change quant aux agressions sexuelles. Elles ne sont plus tues. La preuve, Roméo Elvis s’est excusé publiquement sur son compte Instagram. Pourtant, rien ne va dans son message qui ne fait que renforcer la culture du viol.
« Les réseaux s’enflamment, et oui : j’ai pris conscience d’avoir utilisé mes mains de manière inappropriée sur quelqu’un, croyant répondre à une invitation qui n’en était pas une, et m’arrêtant dans les instants qui ont suivis dès que j’ai compris.
Je regrette sincèrement ce geste et surtout, je réitère publiquement les excuses déjà exprimées de nombreuses fois en privé et en personne.
Je suis le moins bien placé, mais je le pense ce qui est trop souvent vu comme un acte banal est une erreur à ne pas faire. Peu importe qui nous sommes. Je ne suis pas fier de cette situation et espère servir d’exemple à ne pas suivre. »
Roméo Elvis, l’archétype du bon mec
Les fans sont soulagé·es, Roméo Elvis s’est excusé, publiquement qui plus est. Il prend ses responsabilités, contrairement à Moha la Squale qui reste muet depuis le début des accusations. On se retrouve face à deux poids, deux mesures comme l’explique la journaliste féministe Fiona Schmidt. Moha la Squale est un “vrai” agresseur, qui agit avec violence et menaces. Roméo Elvis quant à lui est un good guy, il assume publiquement cette « erreur » qui n’est qu’une mauvaise interprétation. C’est bon, on peut de nouveau écouter sa musique, être en accord avec ce qu’il dit, ce qu’il chante, plus besoin de choisir entre nos valeurs et sa musique. Les commentaires sous son post Instagram deviennent le reflet de ce soulagement. Sauf que son message d’excuses redore simplement son blason sans nommer les choses comme il faut. Utiliser ses mains d’une manière inappropriée sur une autre personne est tout simplement une agression sexuelle. Parler d’invitation qui n’en est pas une revient à montrer que le consentement n’est pas la clé d’une relation sexuelle d’après lui. Invoquer la présomption de mauvaise interprétation revient à se dédouaner, à accuser l’autre un petit peu quand même. C’est pas de sa faute s’il a mal interprété certains signaux envoyés après tout. Rappelons que cette agression a eu lieu dans une cabine d’essayage de la friperie bruxelloise Bison 4, tenue par des amis du rappeur et où sa marque est vendue. Roméo Elvis et la victime se rencontrent, se parlent, rigolent un peu ensemble, avant que cette dernière entre dans une cabine pour essayer des vêtements. Le rappeur la suit, met ses mains sur ses seins, ses fesses, son corps, sans aucun consentement de la part de la victime. Où est la possible invitation ici ? Il est temps d’arrêter de penser qu’une femme qui est aimable avec un homme est pour autant encline à coucher avec. Ce qui est « un acte banal » est en réalité une agression sexuelle, et banaliser cela montre bien tout le problème de la pensée du rappeur.
S’excuser n’est pas effacer
On l’a bien vu, l’affaire a montré que les excuses les plus attendues étaient ironiquement celles de sa sœur, la chanteuse Angèle et de sa copine, Léna Simonne. Celles de Roméo Elvis viennent à point nommé, et qu’il reconnaisse son erreur est la cerise sur le gâteau. On n’en attendait pas tant de lui, il ne nie pas l’accusation. Sauf qu’être un homme non oppressif ne revient pas à s’excuser de ses erreurs, mais à ne pas les commettre. Les commentaires sous sont post semblent oublier cela. Faire ses excuses c’est la moindre des choses dans une telle situation, il ne devrait jamais en être autrement, que l’on connaisse la notoriété ou non. Ces excuses en demi-teinte accueillies par un standing ovation de ces fans sur Instagram montre bien la société dans laquelle on vit ; on n’est pas habitué·es à ce qu’un homme cisgenre hétérosexuel prenne un tant soit peu ses responsabilités quant à une agression sexuelle. Ne parlons même pas des viols. S’excuser n’est pas courageux. Roméo Elvis, tout comme Moha la Squale sont des agresseurs. Le premier, même s’il présente ses excuses, n’est pas qu’un simple mec qui a simplement « dérapé ». Tout l’enjeu n’est pas de se confesser et de se repentir pour continuer à être vu comme un bon mec sans mauvaises intentions. D’ailleurs Lacoste a annoncé le 18 septembre qu’ils mettaient fin à leur collaboration avec l’artiste, ses actes ne répondant pas à leurs valeurs ou éthique. Il faut appeler un chat un chat, et un agresseur un agresseur. Quelles que soient ses raisons et surtout ses excuses.
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