Des artistes urbains se mobilisent pour soutenir moralement et financièrement les hôpitaux. C’est le cas en France et au Royaume-Uni.
Banksy rend hommage aux infirmières
Infirmièr.e.s, aides-soignant.e.s, aides à domicile et médecins sont en première ligne dans la crise du coronavirus. L’artiste Banksy l’a bien compris et a souhaité leur rendre hommage. Pour cela, il a créé une œuvre en noir et blanc, intitulée Game Changer et exposée à l’hôpital de Southampton au Royaume-Uni.
Sur un fond blanc, un jeune garçon joue avec une poupée représentant une infirmière masquée, bras tendu et cape sur les épaules. Elle remplace les héros de fictions inutiles : Batman et Spiderman se retrouvent à la corbeille. C’est ainsi que Banksy célèbre le travail et l’engagement des personnels soignants, véritables héros et héroïnes du quotidien. Un mot de l’artiste accompagne l’œuvre : « Merci pour tout ce que vous faites. J’espère que cela illuminera un peu l’endroit, même si c’est en noir et blanc ». Apparaît néanmoins une forme colorée, haute en signification comme toujours dans le travail de l’artiste. Ici, il s’agit de la croix rouge dessinée sur le tablier.
Banksy ne fait pas que mettre en lumière des femmes courageuses et soutenir à travers elles tout le corps médical, il remet aussi en cause les stéréotypes de genre. D’une part en montrant qu’un petit garçon en salopette peut très bien jouer avec une poupée de sexe féminin et voir en elle un modèle, d’autre part en affirmant que la puissance, la renommée, l’exploit peuvent être parfaitement incarnées par des personnes réelles, qu’importe par ailleurs le genre ou le sexe.
Une fois le confinement passé, l’œuvre sera vendue aux enchères. La somme récoltée sera reversée au National Health Service (NHS), le système de santé publique du Royaume-Uni.
Les street-artists français s’engagent aussi
Il n’y a pas qu’outre-Manche que la générosité opère. En France, l’initiative « Confinement » portée par l’artiste Raf Urban et l’association SAATO, engagée dans la promotion de l’art urbain, a fait ses preuves. L’objectif ? Vendre aux enchères et en ligne des œuvres d’art de petit format. L’argent récolté ira soutenir le fonds d’urgence de l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP). Plus d’une centaine d’artistes urbains ont répondu à l’appel lancé sur les réseaux sociaux. Ont ainsi été créés et vendus pochoirs, dessins et autres peintures. Les créations sont autant d’hommages adressés à toutes les strates de la société. L’œuvre de Graffmatt par exemple, mise à prix à 300 euros, montre une infirmière dans une posture de combat, gants de boxe enfilés, prête à affronter le virus, tandis que celle de Bouda, proposée à 200 euros, représente une couturière fabriquant des masques depuis chez elle à partir de slips et de culottes.
Ce projet solidaire est aussi l’occasion de montrer que l’art urbain n’est pas que contestataire. Il peut être mobilisateur. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 79.415 euros ont été amassés grâce à 281 généreuses donations. La vente solidaire a pris fin dimanche 10 mai mais les œuvres restent visibles sur les pages Instragram et Facebook du “projet saato”. D’autres initiatives du même type existent. L’artiste Cyril Kongo par exemple mettra en vente des digigraphies (ces reproductions limitées, numérotées et signées d’œuvres d’art) au prix de 500 euros l’unité au profit de l’hôpital public. Le projet Campus-19 à Bordeaux vise, lui, à venir en aide aux étudiants les plus précaires grâce à la mise en vente d’œuvres d’art urbain.
Voilà des exemples qui montrent que l’art peut à la fois remonter le moral de gens fatigués, dévoiler la triste et dure réalité du monde contemporain et soutenir financièrement des projets caritatifs. Qui demain pourra encore dire que les artistes sont déconnectés du monde et que l’art ne sert à rien ?